Si, durant les Trente Glorieuses, il s’est agi de redistribuer les fruits de la croissance par des politiques keynésiennes, dans une optique de consommation illimitée de matière et d’espace, dans la seconde partie de l’Anthropocène, il s’agira de refonder les politiques à l’intérieur des limites écologiques. La décroissance en tant que choix politique et éthique désignera alors l'ensemble des politiques de répartition juste de la rareté. Les modes d’allocation des ressources en diminution fonderont les clivages politiques de demain. Ainsi on peut imaginer qu'après la croissance vertigineuse de la Grande Accélération et des Soixante-dix Glorieuses (1950-2020), la descente matérielle du monde sera le deuxième versant de l’Anthropocène, cette "ère de l'Homme" caractérisée par les énergies fossiles et l'industrialisme
Agnès Sinaï est journaliste environnementale et auteure. En mars 2011, elle fonde l'Institut Momentum, réseau de réflexion sur les politiques de l’Anthropocène, les effondrements et la décroissance. Elle dirige les publications de l'Institut Momentum, soit les trois tomes des Politiques de l'anthropocène publiés par les Presses de Sciences Po (2021). En 2010, elle crée à Sciences Po un cours sur les politiques de décroissance. Titulaire d'un doctorat en aménagement de l’espace et urbanisme (Université de Paris Est), elle développe une réflexion sur les biorégions comme lieux d’hospitalité terrestre. Co-auteure de Le Grand Paris après l’effondrement (Wildproject, 2020) et de divers ouvrages, dont Sauver la Terre, co-écrit avec Yves Cochet (Fayard, 2003), Veilleurs de l’eau (La Découverte, 2007),Petit traité de résilience locale (avec Pablo Servigne, Raphaël Stevens, Hugo Carton, ECLM éditions, 2015), Walter Benjamin face à la tempête du progrès (Le Passager clandestin, 2016).